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Le passage de la Loire

La virée de Galerne

A la Loire !
Le 17 octobre 1793, les vaincus de Cholet surgissent à Saint-
Florent-le-Vieil aux cris de « À la Loire ! » Un mot d’ordre
collectif reprenant le point de vue de Bonchamps, qui préconise de tendre la main aux bandes chouannes de Bretagne, et surtout celui de Talmont, qui veut rallier les hommes de Jean Cottereau, dit Jean Chouan, sur ses terres du Maine.

Le but du Prince de Talmont

passage de la loire par les vendéens
Sachant que le prince de Talmont, qui doit mener dans le Maine et en Bretagne une opération de diversion, s'est emparé de Vara-des sur la rive droite, les vaincus de Cholet, affolés, déferlent à Saint-Florent-leVieil, dans l'intention de mettre le fleuve entre eux et les Mayençais. Cent mille personnes, en majorité des civils qui suivent l'armée catholique et royale pour échapper aux républicains, se pressent sur la rive, dans la confusion totale. Transborder cette foule vers l'autre bord, outre les immenses difficultés techniques de l'affaire, relève de la folie. Comment combattre, encombrés de femmes, enfants, vieillards, blessés ? Les abandonner à Saint-Florent? C'est les vouer à la mort, les Bleus ne faisant jamais de quartier. Contre-attaquer? Dans le désarroi du moment, ce serait du suicide...
Philippe de Talmont, seul officier général en état de prendre une décision sensée, opte pour la solution impensable, et parvient, en vingt-quatre heures, à faire franchir la Loire à ces cent mille personnes aux abois. Son but ? Profiter de la surprise de Kléber, qui ne comprendra pas cette manoeuvre démente, et filer vers les côtes bretonnes, soulevant au passage les anciens affidés de La Rouërie. Puis prendre un port, attendre les secours promis par les Anglais et les émigrés ; enfin, les civils mis à l'abri, lancer une attaque surprise vers Paris. Il s'en faudra de très peu que cette stratégie réussisse et triomphe de la Révolution.

La témoignage de la marquise de La Rochejaquelein

traversée de la loire par les vendéens
Commencé le 18 octobre 1793 à l'aube, le passage de la Loire s'achève tard dans la nuit du même jour. Le souvenir de cette journée sera évoqué en ces termes par la future marquise de La Rochejaquelein : « La plupart des paysans se trouvèrent à Saint-Florent bien avant les officiers, s'étant enfuis plus vite ; la moitié de l'armée y arriva donc la nuit. Les quatre mille Bretons ou Angevins, habitants de la rive droite de la Loire, qui avaient suivi MM. de Talmont et d'Autichamp, amenèrent des bateaux; Ils appelaient à grands cris les Vendéens et leur répétaient : "Venez, mes amis, dans notre pays ; tout le monde y est aristocrate, vous ne manquerez de rien ". Nos gens, qui étaient tous saisis d'une terreur panique, se jetèrent en foule dans les bateaux. Quand les officiers arrivèrent au point du jour, c'était un spectacle étonnant et qu'on ne reverra jamais. Nous étions à Saint-Florent, les uns disent cent mille, les autres soixante-dix mille, dans ce nombre environ dix mille femmes, dames ou paysannes, et à peu près autant d'enfants et de blessés.
Tous ces gens s'échappaient du massacre et de l'incendie : on voyait la fumée des maisons où les hussards mettaient le feu, à deux lieues de nous. A cet endroit, la Loire a une petite île, plus près de Saint-Florent que de Varades ; il y avait une vingtaine de bateaux; les Vendéens se précipitèrent dedans ; d'autres passaient à la nage, ou sur les chevaux qu'un gué conduisait jusqu'à l'île. Cette île et les deux bords de la Loire étaient remplis de monde; chacun s'appelait, se culbutait; ceux qui étaient à Saint-Florent tendaient les bras aux autres ; il semblait que le fleuve une fois passé, toutes nos peines seraient finies. La plupart des officiers étaient sur la rive, tâchant de retenir les soldats, mais ceux-ci n'écoutaient rien. »

Combien sont-ils à avoir ainsi franchi le fleuve ?

Au malheureux Lescure lui murmurant : « Si je tenais le jean-foutre qui nous fait passer la Loire, j'utiliserais mes dernières forces pour lui brûler la cervelle », La Rochejaquelein aurait pu répliquer que c'est tous les Vendéens qu'il aurait alors fallu tuer sur place. Combien sont-ils à avoir ainsi franchi le fleuve ?
Soixante-dix mille à cent mille, si l'on en croit Victoire de Donnissan, dont, précise-t-elle, vingt mille sont des non-combattants. Kléber parle, de son côté, de soixante mille combattants, sans comprendre prêtres, femmes et enfants. Le nombre total, impossible à fixer avec précision, doit se situer entre soixante et quatre-vingt mille personnes ; celui des combattants effectifs, de valeur d'ailleurs très inégale, entre trente et quarante mille.
bas
L'instant de grâce

Reste à s’occuper du sort des 4 à 5 000 prisonniers républicains
que les vaincus ont emmenés à leur suite. Enfermés dans l’église abbatiale de Saint-Florent, ils semblent promis au massacre. Les Vendéens veulent en effet leur réserver un mauvais parti, en
représailles des ravages commis par les Bleus depuis des semaines à travers la Vendée militaire, mais aussi pour ne pas les laisser derrière eux une fois passée la Loire.

Transporté dans une maison de Saint-Florent, Bonchamps,
mortellement blessé à Cholet, est informé de ce qui se prépare. Il charge D’Autichamp d’un courrier dans lequel il demande à ses compagnons d’armes la grâce des prisonniers : « Ce sera sûrement le dernier ordre que je vous donnerai, laissez-moi l’assurance qu’il sera exécuté. ».
Le chef des compagnies angevines, arrivé avant
qu’il ne soit trop tard, délivre son message, puis s’exclame :
« Bonchamps le veut ! Bonchamps l’ordonne ! » Il obtient gain de cause.